Un « manuel de survie » dans une France fragilisée par la Défiance
Aveu d’impréparation…
Avant l’été 2025, le gouvernement français distribuera à chaque foyer un document intitulé « manuel de survie », un simple dépliant invitant les citoyens à préparer des réserves d’eau, de nourriture et de médicaments essentiels. Une mesure de bon sens, disent certains. Pourtant, dans un climat d’incertitude et de défiance, cette communication est perçue par beaucoup comme l’aveu brutal d’une impréparation nationale face à des risques systémiques, notamment celui d’un conflit de haute intensité.
L’initiative, en apparence anodine, ravive des peurs profondes. Elle réveille la conscience d’un manque de résilience criant, déjà pointé par la Cour des comptes dans son rapport public annuel de 2022* : l’autonomie alimentaire des communes françaises est jugée « très insuffisante » en cas de rupture prolongée des chaînes d’approvisionnement.
En effet, la majorité des 35 000 communes françaises n’a ni Plan Communal de Sauvegarde (PCS) pleinement opérationnel, ni Document d’Information Communal sur les Risques Majeurs (DICRIM) correctement diffusé. De nombreux maires ignorent même l’existence de ces obligations réglementaires, laissant leurs administrés sans information ni préparation.
Ce déficit d’organisation locale, combiné à une absence de culture du risque au sein de la population, fragilise le socle sur lequel repose la gestion de crise en France. Et dans ce vide, la défiance prospère.
Pourquoi un « manuel de survie », alors qu’il existe déjà le Plan Familial de mise en Sûreté et le Plan Individuel de Mise en Sûreté ?
Un terreau fertile pour la défiance
Certaines franges de la population, déjà en rupture avec l’État, voient dans cette communication tardive une confirmation de leurs soupçons. Elles accusent les institutions de dissimulation, d’amateurisme, ou de manipulation. Ce sont ces mêmes groupes sociaux qui, en cas de crise majeure, refuseront toute coopération avec les autorités. Or, « sans confiance, il n’y a pas de communication. Sans communication, il n’y a pas de coordination. Et sans coordination, c’est la coopération elle-même qui disparaît. » (Dixit Pierre Lannes, Ergonome, membre de SosMaires)
Dans un contexte de crise, l’absence de coopération ne fait qu’ajouter du drame au drame.
Scénario noir : une attaque cyber hypothétique, mais crédible
Ce climat de méfiance pourrait se révéler dévastateur en cas de crise réelle. Imaginons une attaque coordonnée, menée par un État hostile à la France, ciblant les infrastructures critiques par le biais de killware — des logiciels malveillants conçus pour provoquer des dysfonctionnements mortels dans les systèmes essentiels à la vie (eau, énergie, logistique alimentaire). Ce type de cyberattaque, bien que hypothétique, s’inscrit dans les menaces jugées crédibles par l’ANSSI dans son Panorama de la cybermenace 2023*, qui souligne une montée en puissance des attaques destructrices et sophistiquées.
En quelques heures, l’approvisionnement alimentaire est perturbé. Les supermarchés sont vidés dans la panique. Des scènes de pillage et de violence éclatent, non seulement dans les zones urbaines, mais aussi chez les producteurs locaux, attaqués par des habitants désespérés.
Le continuum sécurité-défense à l’épreuve du doute
Dans ce chaos, les familles des forces de l’ordre et des militaires se retrouvent en première ligne. Elles appellent leurs proches en uniforme, les suppliant de revenir les protéger :
« Ils pillent la ferme du voisin, ils ont des armes. Maman est tétanisée. Rentre papa, je t’en supplie !… »
Ces appels mettent en péril le continuum sécurité-défense, cet ensemble d’acteurs — policiers, gendarmes, militaires — unis par la conviction de protéger l’État et ses citoyens. Quand le doute envahit les familles de ceux qui sont au cœur du dispositif de défense intérieure, c’est la cohésion même de la Nation qui menace de s’effondrer.
Et lorsque les hommes et les femmes en armes hésitent entre obéir à leur devoir ou protéger leur foyer, la chaîne de commandement vacille.
Une alerte qui fait écho à des mises en garde anciennes
Déjà en 2019, une proposition de résolution déposée au Sénat le 20 juin, intitulée « Résilience alimentaire des territoires et sécurité nationale »*, alertait sur les risques liés à notre dépendance alimentaire et à la vulnérabilité des territoires en cas de crise majeure. Ce texte anticipait ce que le rapport de la Cour des comptes en 2022 allait confirmer : la France est loin d’être prête à affronter un choc durable.
La défiance : l’ennemie intime de la gestion de crise
Les événements récents montrent que la défiance n’est plus marginale. Elle touche des pans entiers de la société, et cette défiance, lorsqu’elle devient généralisée, rend impossible toute coordination en situation d’urgence. Elle rompt le lien vital entre l’État et ses citoyens. Sans ce lien, il n’y a plus de gestion de crise possible, seulement des réponses fragmentaires, inefficaces et chaotiques.
En 2025, la France découvre que l’impréparation des communes, l’absence de culture du risque et la fragilité de ses infrastructures ne sont pas des détails techniques. Ce sont des failles capables de briser le continuum sécurité-défense, ce fil fragile qui tient la République debout face au pire.
A SosMaires, nous insistons sur la mise en place de scénario de préparation des populations aux risques majeurs. Ces entrainements doivent être inclusifs, prendre en considération tous les publics, sans discrimination. C’est ainsi qu’il est possible de faire société. Dans un contexte géopolitique sentant le souffre, l’entre-soi risque d’être mis à l’épreuve du réel.
Alexandre BOISSON
(ex-policier de proximité, ancien de la BAC NUIT 75 et du GSPR)
Sources :
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